Dernière mise à jour :
23 / 04 / 2024

VU en Classe : Enseignement réciproque de la lecture

04 / 03 / 2020 | Jean-Claude Rolland | Rémi Guyot

VU EN CLASSE
En CM2, à l’école Jaurès 2, en éducation prioritaire, enseigner des stratégies de compréhension en lecture, améliorer la compréhension, apprendre à s’entraider de manière explicite et efficace.
Un contexte d’apprentissage mutuel et coopératif.

👁️‍🗨️ Le point de vue de l’enseignant

L’enseignement réciproque est une stratégie utilisée pour amener les élèves à lire avec fluidité et à développer leurs compétences en compréhension lors de la lecture.
C’est une activité de communication orale spontanée au cours de laquelle tous les membres d’un groupe construisent ensemble, à l’oral, le sens d’un texte en faisant des prédictions, en clarifiant, en résumant et en posant des questions. Cette activité vise à améliorer la compréhension des textes à lire dans toutes les matières en utilisant la communication orale comme médium d’enseignement.
Les objectifs de l’enseignement réciproque :
 améliorer la compréhension en lecture des élèves.
 s’entraider dans un contexte d’apprentissage coopératif.

4 axes - Compréhension lecture

Préparation :
 Enseigner explicitement, au besoin, les quatre stratégies de compréhension en lecture suivantes préalablement avec les élèves : prédire, clarifier, se poser des questions et résumer à partir d’un texte.
 Choisir des textes documentaires au départ pour ensuite travailler les textes narratifs, des textes présentant des défis sur le plan de la compréhension que les élèves sont en mesure de surmonter.
 Former à l’avance des groupes hétérogènes de quatre élèves.
 Préparer des outils, il s’agit de fiches récapitulatives individuelles avec amorces de phrases pour lancer tous les élèves dans la tâche, deux types de fiches : des fiches pour les meneurs de groupe et des fiches pour les autres membres du groupe.
Déroulement :
1- Remettre aux membres de chaque groupe un texte à lire en entier.
2- Expliquer aux élèves ce que l’on attend d’eux et leur présenter le référentiel : Les quatre stratégies de l’enseignement réciproque ainsi que les fiches.
3- Inviter les élèves à prendre la parole à tour de rôle. Les meneurs de chaque groupe animent la discussion en utilisant les quatre stratégies ciblées. (1ère étape : prédire le texte sans l’avoir lu, 2ème étape, après la lecture du texte, clarifier le texte, expliquer des mots ou des passages difficiles, 3ème étape, se poser des questions et la 4ème étape : résumer le texte).
4- Circuler parmi les groupes dans le but d’observer les élèves et intervenir, au besoin.
5- Faire ressortir les éléments positifs et les éléments à améliorer à l’aide d’éléments ciblés, tirés de la Fiche d’observation des compétences langagières à l’oral.

Les groupes de travail sont des groupes hétérogènes. En effet, ces groupes sont porteurs car ils permettent aux lecteurs moins aguerris de bénéficier des stratégies de compréhension des élèves les plus performants. Ces derniers vont servir de modèle dans l’application de ces stratégies et surtout dans la manière de les énoncer. Les élèves qui rencontrent des difficultés vont pouvoir se lancer dans la tâche plus facilement, ils vont prendre confiance en eux.
Il est possible de laisser aussi des élèves en autonomie. L’enseignant prend en charge une autre partie de la classe en pratique coopérative ou guidée pour les élèves qui en auraient besoin.
Il est envisageable de mettre en place des groupes homogènes en proposant des textes différenciés en fonction du niveau des groupes. Ainsi, chaque groupe avancera selon son rythme et ses capacités et sera mis en face de défis de compréhension adaptés à ses besoins.
Après avoir mis en place plusieurs séances de lecture réciproque, j’ai observé des élèves motivés ayant envie de lire, comprendre les textes et de coopérer. Les élèves rencontrant des difficultés en lecture se sont lancés dans l’activité facilement. En effet, au cœur de ce dispositif repose un travail en petits groupes favorisant la prise de parole. Tour à tour, les élèves apportent leurs hypothèses, leurs interprétations qu’ils partagent entre eux. Les élèves travaillent sereinement, ils peuvent prendre des risques, essayer, se tromper… ce qui développe à la fois l’autonomie et la confiance en soi. Enfin, le travail collaboratif incite également à développer des capacités d’écoute, d’entraide et de travail en équipe.
Du point de vue de l’enseignant : c’est un outil efficace qui permet de résoudre les difficultés de compréhension d’un texte. C’est aussi une pratique pédagogique qui permet de s’adapter à tous types de lecteurs. L’enseignant peut la mettre en pratique dans différentes disciplines.

Mme A, enseignante de CM2 ; école Jean Jaurès 2.

👁️‍🗨️ Le point de vue de l’I.E.N.

Alors que les résultats des élèves, nous amènent à penser que la majorité d’entre eux, même des plus performants, opère peu de régulation ou d’auto-régulation de leur compréhension, la proposition me semble donner un cadre possible à un enseignement explicite de ce type de stratégies.

L’exploitation du groupe et des interactions favorise la mise en place explicite de stratégies d’autorégulation par les élèves, elles-mêmes régulées ou questionnées par les pairs sous le contrôle de l’enseignant. C’est bien la fréquence de ce travail au sein de la classe qui permet à l’élève de transformer ce qui pourrait être une technique pour répondre à l’exercice en une compétence de compreneur expert et autonome.

L’expertise transversale de l’enseignant se joue dans la capacité à organiser ce type « d’atelier » au niveau de sa gestion de classe et de sa gestion de l’emploi du temps. L’expertise didactique spécifique se jouera dans la capacité à exprimer « simplement » ces stratégies d’auto-régulation et mettre en relief, avec les élèves, les situations dans lesquelles elles leur permettront de consolider leur compréhension de texte.

Rémi GUYOT, Inspecteur de l’Éducation Nationale.

👁️‍🗨️ Le point de vue du conseiller pédagogique

On traite ici à la fois des enjeux de l’enseignement de la compréhension de l’écrit comme objectif d’apprentissage, que je n’évoquerai pas ici, et ceux de l’enseignement dit "réciproque" comme moyens et modalités d’enseignement.
Ce dernier terme, d’usage récent en France (1984 au Canada), engage les élèves dans des interactions entre pairs, entraides et autonomie. C’est un enseignement explicite au sens popularisé par le canadien Steve Bissonnette, il s’agit d’« instruction directe » : modelage, pratique dirigée, pratique autonome.
Voir : Ifé : Enseigner plus explicitement : l’essentiel en quatre pages. La phase de pratique dirigée, ici, met l’accent sur les rétroactions et les échanges.
Cela évoque cependant également enseignement mutuel, coopération entre les élèves et pratiques coopératives.
L’enseignement mutuel existe en France aux XVIIIème et XIXème siècle ; il est remplacé progressivement par deux modes principaux : individuel et simultané - « ...on reprochait à la méthode d’ébranler les bases de l’ordre social, en déléguant à des enfants un pouvoir qui ne devait appartenir qu’à des hommes. Un grand nombre, allant plus loin, repoussaient l’enseignement mutuel parce qu’ils repoussaient toute instruction pour le peuple. » .
Voir La classe mutuelle, entretien avec Vincent Faillet, 2017
Les pratiques coopératives apparaissent dans les premières années du XXème siècle, portées par des enseignants convaincus de la nécessité de mettre en place dès l’école primaire, une éducation active à la démocratie et à la « coopération ».
Les projets de la classe, les projets individuels des élèves, les débats à propos des activités, les négociations, ... s’inscrivent alors naturellement dans cette recherche de sens. Savoir ce que l’on veut faire et pourquoi, c’est définir ses propres objectifs dans un projet.
La vie coopérative de la classe permet, par la prise en compte de la parole de l’enfant, d’entendre, de comprendre ses désirs, ses besoins pour ensuite faire converger le projet de l’enseignant et le projet d’enfant. Elle permet également de faire se rencontrer les projets de plusieurs enfants et d’ainsi créer des groupes dont les liens se tissent autour du désir d’apprendre.

Jean-Claude ROLLAND, maître formateur, conseiller pédagogique

Des ressources, des pistes.
 Les quatre stratégies de l’enseignement réciproque- Adapté de Quatre stratégies à utiliser, Atelier.on.ca, 2007
 L’enseignement réciproque de la lecture. Interagir pour mieux comprendre., Université de Montréal, - mai 2013
 Steve Bissonnette : Enseignement explicite : l’inférence en lecture
...
 Enseigner la compréhension en lecture Cycle 2
Conférence de Rémi Guyot, IEN à Épinay 2019-2020
 Enseigner la compréhension : principes didactiques, exemples de tâches et d’activités - Sylvie Cèbe , Roland Goigoux, Serge Thomazet
 Zoom sur l’enseignement de la compréhension
...
 Programme d’Enseignement moral et civique, arrêté du 17-7-2018 - J.O. du 21-7-2018
 Coopération entre élèves à l’école, Ministère de l’éducation Nationale (Dgesco-DMPLVMS), 2015
 icem-pedagogie-freinet. Institut coopératif de l’école moderne.
 Des groupes dans la classe (1ère partie ; 2ème partie ; 3ème partie) - Eppee.ouvaton - 2004
...

 

MOTS-CLÉS

 cycle 3  français-lire & écrire

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